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L’art très très moderne : petite leçon de Street Art avec Alain-Dominique Gallizia


  • Commençons par le lexique : tag ou graff ?
Le dictionnaire définit un tag comme un graffiti tracé sur des façades ou des lieux publics. Le mot graffiti vient à la fois du grec graphein (écrire, dessiner, peindre) et du latin graphium (éraflure). Il correspond à des « dessins ou inscriptions sur un mur de façade, réalisés souvent à l'aide d'une bombe de peinture ».
La différence est ténue. Tentons d’y  voir plus clair.
Un tag est un écrit, non une œuvre d’art, c’est un paraphe, une typographie.
Le graff est une calligraphie ayant évolué vers le dessin.
Le trait du tag évolue, devient une surface, puis les artistes travaillent sur l’enchainement des lettres afin de leur donner un mouvement, une énergie. Le remplissage entre les lettres prend de l’importance, et les figures se développent.
Le mouvement est découvert à New-York, au tout début des années 70. L’arrivée de la peinture en bombe issue de l’industrie auto est vécue comme un nouvel instrument appelant un nouvel art.
Les premiers supports sont des trains (d’où le nom de « Subway Art »), et le thème représente majoritairement la signature de l’artiste, façon pour lui d’exister, de se démultiplier. Le graffiti prend en effet la forme d’un nom aux lettres élargies (un flop) de forme ronde ou carrée. Puis, au bout du mouvement se trouve l’abstraction, la réflexion à l’aide d’un carnet d’esquisses, et la peinture sur toile.

Cet univers vraiment à part est règlementé par des usages rappelant la chevalerie. Il s’agit alors d’une joute esthétique. A ce titre les jeunes sont appelés à réaliser un exploit d’ordre artistique avec une grande prise de risque relative au support et à son accessibilité, qui provoquerait tout de même la mort de 15% des artistes chaque année. Parmi les faits marquants : des graffs sur un éléphant du zoo de Philadelphie, sur les lettres mythiques de la colline d'Hollywood, ou vraiment inadmissible, sur le tableau Guernica alors exposé au MOMA (dans les années 70).

La flèche ou pointe sur la signature, hommage aux maîtres, valorise la relation avec les anciens. Les protagonistes codifient en effet cet art et s’attribuent des titres comme celui de king (voir la couronne sur la signature de Basquiat) ou le « one » suivant le nom. Une œuvre « clean » sera celle d’un maitre en opposition à celle d’un jeune dont la peinture va couler. Il faut en effet réaliser que dans cette forme d’art la prise de risque est maximale, l’œuvre se fait en un jet, sans possibilité de reprise. On raconte qu’en cas de ratage, l’artiste recouvre tout en noir avant de quitter les lieux.
  • Écartons les idées reçues :
Cette forme d’art est gratuite, personne ne vous demandera d’argent.
Aucun message d’agressivité ne se lit sur les œuvres, et l’humour apparait souvent en filigrane. Le thème « imposé » par Alain-Dominique Gallizia pour la collection qu'il créé est d’ailleurs l’amour, face à la signature de l’artiste.
Les graffeurs ne sont pas individualistes : nombreux sont ceux qui se regroupent, dès les débuts, pour réaliser des œuvres plus rapides, plus grandes, plus fortes, plus innovantes.
En France aujourd’hui, les artistes majeurs seraient plutôt bien nés et bien éduqués en particulier au niveau artistique, d’où l’influence sur leurs œuvres de plasticiens tels Dubuffet, Miro, ou Jackson Pollock.
Lors de l’expo "Tag au Grand Palais" (printemps 2009) seule une galerie expose ce courant. Elles sont aujourd’hui plus de 60 et certaines œuvres emblématiques sont estimées autour de 50 000€ (sans parler de la cote de Basquiat, artiste à part dans cet univers).
  • Pourquoi le Street Art ?
Appelé aussi pressionnisme, l’art sauvage est avant tout un art pour le peuple, allant de lui-même vers le public. Il pose la question de la visibilité pour tous des œuvres dans les musées, et évite également le rapport entre l’art et l’argent, trop banalisé.
Difficile de résumer le street art en une expo, un livre, un reportage ou un article. Il est d’une immense variété, et en constante métamorphose.
C’est l’idée même de la modernité et de la vie.
  • Pour aller plus loin : L’Art Sauvage en images
- Livres
« Subway Art 25th » par Henry Chalfant & Martha Cooper, le livre d’art le plus vendu au monde
« Graffiti » du photographe Brassaï, conversations avec Picasso
« Birth of graffiti » du photographe John Narr
- Magazines
Connaissance des arts « Tag et graff au Grand Palais » la collection Gallizia
Beaux Arts Editions « L’art du Graffiti - 40 ans de pressionnisme » Collections Gallizia au Grimaldi Forum de Monaco
Graffiti Art magazine
- Films
Style Wars par Tony Silver avec la collaboration d'Henry Chalfant
Writers 1983-2003 Vingt ans de graffiti à Paris par Marc-Aurèle Vecchione 
- Expos / galeries / musées / happening / web
Découvrez l’Atelier de l’art sauvage à Boulogne-Billancourt sur collectiongallizia.com. Alain-Dominique Gallizia vous y reçoit sur rendez-vous. Récit d’une visite privée, en mots et surtout en images : cliquez ici.
Revoir « Le Tag au Grand Palais – La collection Gallizia 300 œuvres internationales», exposée du 27 mars au 26 avril 2009, sur tagaugrandpalais.com
Parcours street art guidé près du canal St Martin avec promenonsnousdanslesarts.com
Le musée de la mémoire des murs Serge Ramond pour les graffitis historiques.
Le festival International de Graffiti et de Street Art "Kosmopolite" de Bagnolet
Des expos à la Galerie du jour Agnès b
Le musée international des Arts Modernes d’Hervé Di Rosa à Sète
fatcap.org"FatCap est la plateforme ultime sur le graffiti et le street art"
- Jeux, déco & objets
Déco « tag » par Teo Jasmin : sublimes canapés, coussins, tableaux et accessoires : le choc de l’ancien et de l’avant-garde.
Le jeu « Dessiner des tags » par Djeco, à partir de 7 ans pour faire connaissance avec les différentes typos et ensuite créer ses tags. Environ 25€ le coffret.
Il existe aussi de nombreux carnet de dessins, ainsi que des jeux vidéo sur ce thème.
  • Continuez l'histoire :
Photographiez ceux qui vous plaisent pour constituer un album virtuel. Ultra moderne.

Autre idée : comme Géraldine (ci-contre son "caritas aeterna" réalisé par l'artiste Kitch) et Prune (ci-dessous "Green" par Simer Crew), faites taguer un mur sans âme de votre jardin d'un graff hautement symbolique.

 



Faire connaissance avec ce qui nous est inconnu permet de passer de l’agacement à la compréhension, puis à l’intérêt.
C'est l’occasion, si ténue soit-elle, de faire la différence entre création et altération, ne la laissons pas passer.